Je suis Salomon KITOKO WUNDA Professeur de Français au Collège SADIDSANA à Kikwit en République Démocratique du Congo.
Après que j’aie fini mes études à l’Institut supérieur pédagogique de Kikwit en 1999, j’ai été engagé comme professeur de Français au Lycée SANKURU, une école des sœurs de Marie au Kwango à Kikwit.
En 2004, j’avais publié un article dans Renaître, une des revues chrétiennes de notre pays, dont le titre était : « Dieu : une raison ou un prétexte pour justifier notre vocation. » Je faisais allusion à la prolifération des sectes et églises dites de « Réveil » dont le but me paraissait lucratif, en cette période de crise multi formes que connaissait la République Démocratique du Congo, sans penser aux œuvres sociales comme l’ont fait nos missionnaires. En réalité, c’était une conséquence logique d’une crise socio-économique.
Un beau jour à 10h, pendant la récréation, un prêtre jésuite vint me chercher. C’était le père Gaston KITOKO, SJ, d’heureuses mémoires. Il voulait me voir et me connaitre, vu que nous étions des homonymes, ainsi que me féliciter pour l’article susmentionné.
Cette même année, le collège SADISANA cherchait un enseignant pour combler le vide laissé par un professeur de français qui venait de quitter Kikwit pour Kinshasa. Ayant appris la nouvelle, Jai introduit mon dossier à la coordination afin de solliciter une mutation du lycée SANKURU pour le collège SADISANA. Ce qui fut fait.
A mon arrivée au collège SADISANA, J’ai trouvé un préfet laïque très engagé, Monsieur Gaston KIMANA MWEKUNG ainsi que le père Carlos Mejía, Sj, directeur des études et Recteur du collège. Les deux autorités travaillaient en étroite collaboration. C’est là que j’ai appris la pédagogie Ignatienne, et la précieuse phrase : « Former des hommes et des femmes pour les autres ». J’ai appris petit à petit à intérioriser et à appliquer ces deux concepts dans ma vie professionnelle et sociale.
Ce qui était le plus frappant pour moi dans cette expérience était le fait de constater que dans cette école Jésuite, les enseignants, laïques comme jésuites, accordaient une attention particulière à tous les élèves. L’éducation qu’ils offraient était intégrale. La discipline était bien organisée. Il y avait un dialogue permanent entre la direction de l’école et toute l’équipe éducative.
Le père Carlos n’hésitait pas à s’excuser en toute sincérité auprès des enseignant s’il trouvait que ses actes ou ses propos les avaient vexés. Il était très attentif à tous les problèmes tant pédagogiques que sociaux que nous lui posions.
Le préfet Gaston KIMANA quant à lui, était toujours aux cotés des enseignants, dialoguant avec eux, et prenant une tasse de thé ces derniers durant la pause. J’étais agréablement marqué lorsque je l’ai vu un jour venir me rendre visite lorsque j’étais malade. La collaboration ne s’arrêtait pas au niveau professionnel mais s’étendait également au social. Je me sentais de plus en plus intégré et considéré dans cette nouvelle école. C’est ce que les Jésuites appellent la « Cura Personalis » !
En outre, j’étais fasciné par l’organisation des activités spirituelles : messes, recollections, retraites, sacrements… tant pour les élèves que pour l’équipe éducative. La formation intégrale était une « réalité vécue ».
J’ai également été désigné à de nombreuses reprises pour accompagner nos élèves à la retraite au Centre Spirituel Jésuite KIPALU pour le discernement en dehors des recollections et retraites de l’équipe éducative.
Ces activités m’ont beaucoup aidé à consolider ma foi en tant que chrétien catholique.
Le vécu du « Magis » et de la notion de « femmes et hommes pour les autres »
Les différents Recteurs ne cessaient de nous répéter que l’éducation Jésuite vise l’excellence, le « Magis ». Effectivement je constatais que tous mes collègues s’y investissaient et les résultats de nos élèves étaient toujours meilleurs. Cela parce que les efforts à fournir étaient attendus des « enseignants » et des « élèves ». Au fil du temps, j’ai compris que la collaboration était un principe-clé dans la réussite de l’éducation Jésuite.
J’ai appris à aimer et à aider davantage les élèves au rendement moyen que je dédaignais autrefois, les considérant comme un poids alors qu’ils avaient parfois besoin de mon concours pour sortir de leur torpeur.
J’avais en effet l’habitude de mettre en marge à l’école, dans la société tout comme en famille, ceux que je considérais comme « faibles », « ratés ». J’ai compris que par mes conseils et mon expérience, je pouvais aussi aider certaines personnes à se reclasser dans la vie, pas forcément avec les moyens matériels. Et ce, grâce à ce groupe de mots : « des femmes et des hommes pour les autres ».
Mon expérience au collège SADISANA a beaucoup impacté sur ma vie de manière générale. Mon appréhension de la vie professionnelle, sociale et spirituelle a connu un changement conséquent. Ceci est une preuve palpable que la pédagogie Ignatienne ne bénéficie pas qu’aux « élèves » mais également aux « éducateurs ».
Source: Educate Magis
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